Rachat de Teads par Outbrain : analyse concurrentielle du secteur de la publicité en ligne en France et au Royaume-Uni

Dans cet article publié dans la Revue Lamy de la concurrence, Étienne Chantrel, Associé chez Eight Advisory, commente les enjeux en matière de concurrence dans le secteur de la publicité en ligne suite à l’acquisition de Teads par Outbrain.
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Le marché de la publicité en ligne, impliquant éditeurs, annonceurs, plateformes (SSP/DSP) et internautes, est difficile à analyser pour les autorités de concurrence en raison de sa complexité technologique, de l’automatisation (vente programmatique) et de l’usage intensif des données. Le rachat de la société Teads, jusqu’ici filiale du groupe français Altice, par la société américaine Outbrain qui en a acquis le contrôle exclusif, a permis à deux autorités, l’Autorité de la concurrence en France et la Competition and Markets Authority (CMA) au Royaume-Uni, de prendre position sur leur analyse de ce secteur complexe.
L’autorité française donne son feu vert, le régulateur britannique dissèque chaque détail.
L’Autorité de la concurrence française se prononce pour la première fois sur une opération de concentration dans le secteur de la publicité en ligne. Elle s’est beaucoup appuyée sur un avis rendu en 2018 sur le secteur pour définir les marchés pertinents : publicité liée vs non liée à la recherche, réseaux sociaux vs hors réseaux sociaux, formats vidéo vs non vidéo. Elle autorise l’opération en s’appuyant sur les faibles parts de marché des parties (<5 %) et l’existence de nombreux concurrents. Elle reconnaît leur complémentarité mais ne la juge pas problématique d’un point de vue concurrentiel.
La Competition and Markets Authority (CMA) au Royaume-Uni ne s’appuie pas pour sa part sur les parts de marché mais explore en détail plusieurs risques concurrentiels que l’opération pourrait engendrer : effets horizontaux (liés à la concentration dans l’offre de services de plateformes de publicité vidéo) et effets congloméraux (ventes liées entre les services de Teads et d’Outbrain pour exclure des concurrents). Elle conclut toutefois aussi à une absence de menace concurrentielle, estimant que Teads et Outbrain ne sont pas des concurrents proches et que la pression du marché restera suffisante.
Concurrence vs souveraineté : quand le droit des concentrations atteint ses limites ?
« Le contrôle des concentrations n’est sans doute pas le meilleur instrument pour traiter des questions qui sortent du champ de la concurrence, et en particulier des questions de souveraineté. », Étienne Chantrel, Associé chez Eight Advisory.
En effet, l’affaire Teads/Outbrain relance le débat sur les rachats d’entreprises européennes innovantes par des groupes étrangers, souvent hors de portée du contrôle classique des concentrations. Si cette opération ne posait pas de problème concurrentiel, elle soulève des questions de souveraineté technologique. Ni l’Autorité ni la CMA n’ont pris en compte cet enjeu, leur mission se limitant à l’analyse concurrentielle. Cela montre les limites du droit des concentrations pour traiter des enjeux plus larges comme la souveraineté industrielle.
Retrouvez la version intégrale de cet article dans le numéro 149 de la Revue Lamy de la concurrence de mai 2025 ou téléchargez un extrait de l’article.
Équipe éditoriale : Étienne Chantrel, Laëtitia Martini

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